Je suis un chef indien et je fais partie de l’Alliance des chefs Slow Food.
Ma mère m’a souvent raconté qu’à cinq ans, j’aimais déjà tellement la cuisine que je m’échappais fréquemment pour aller espionner dans les cuisines des grands hôtels. Après l’ouverture de mon restaurant, j’ai commencé à travailler avec Slow Food dans les communautés locales du nord-est de l’Inde. Ce qui est intéressant, c’est que j’étais parti pour enseigner comment comprendre et utiliser les différentes saveurs, mais j’ai appris de nouvelles choses en retour, ce fut un véritable échange de connaissances. Dans ma cuisine, j’utilise beaucoup le bambou et le porc fumé avec des graines de soja fermentées, qui sont des ingrédients très populaires dans la cuisine de la région nord-est. La coriandre locale, les patates douces, le riz noir, les boulettes de taro fermenté, les graines de périlla et l’hibiscus ont des saveurs très particulières. Je prépare aussi des salades à base d’herbes indigènes comme l’herbe du tigre, des fougères comestibles, des feuilles de haricots en forme de coeur et des champignons. Les ingrédients de cette région sont toujours les mêmes, mais les recettes varient selon les communautés et les générations. Il existe par exemple une méthode de cuisson du poisson dans des feuilles de bambou appelée Angu Pongsen, dont le processus unique est décrit dans l’Arche du Goût.
Même si la cuisine du Nord-Est adopte de nouvelles tendances, je crois qu’il ne faut jamais mettre de côté les traditions. Depuis cinq ans, je fais partie du jury d’un festival de cuisine où j’ai découvert des recettes innovantes très intéressantes, comme une tarte préparée à base d’une variété locale de millet.
Je vous présente ici une recette à base de graines de soja fermentées (Axone). En tant que chef, je m’intéresse beaucoup aux histoires liées aux aliments. Il existe une légende Sumi sur la découverte de l’Axone : une petite fille orpheline adoptée par sa tante était maltraitée par cette dernière. Un jour, la tante lui donna à manger des graines de soja bouillies dans de l’eau sale et entourées de feuilles de bananier. La petite fille refusa de les manger, mais quelques jours plus tard, affamée, elle ouvrit les feuilles de bananier et découvrit que les graines avaient fermenté. Elle les partagea alors avec ses voisins.
Porc fumé à l’axone
(Awoshi kipiki ngo axone)
Ingrédients
Porc fumé – 1 kg (au Nagaland, le porc est traditionnellement fumé dans la cuisine, où les repas quotidiens sont cuits au feu de bois. L’animal est préparé et coupé en deux dans la longueur avant d’être suspendu au dessus du poêle à bois. Il faut environ 15 à 30 jours pour obtenir une viande entièrement fumée et séchée. Il est possible d’utiliser d’autres morceaux de porc en remplacement du porc fumé.)
Graines de soja fermentées (axone) – 200 grammes
Piment séché – 10 graines
Grains de poivre Majenga – 20 grains (grillés et broyés) [*]
Gingembre – 10 grammes
Ail – 10 grammes
Sel
Préparation
- Laver le porc fumé dans de l’eau chaude et couper la viande en gros morceaux.
- Mettre à cuire la viande dans une casserole pendant 5 minutes, puis ajouter l’axone, le piment séché, le sel et l’eau et prolonger la cuisson.
- Après quelques minutes, retirer le piment entier afin de le hacher.
- Lorsque la viande est tendre et bien cuite, remettre le piment, ainsi que le gingembre écrasé et l’ail.
- Ajouter les grains de majenga grillés et broyés *[utiliser du poivre aromatique si le majenga est introuvable] et laisser mijoter quelques minutes de plus.
- Servir avec du riz chaud.
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